En 2017, la chanteuse canadienne Kiesza a été victime d’un accident de voiture à Toronto qui a causé une lésion cérébrale traumatique. Pendant deux ans, elle a travaillé à son rétablissement et elle publie maintenant de nouvelles chansons par l’entremise de sa propre maison de disques, Zebra Spirit Tribe. Mais le processus de rétablissement est loin d’être terminé. Kiesza a parlé avec Lésions cérébrales Canada à propos de sa blessure, de ses difficultés et de la façon dont elle progresse chaque jour.
Après l’accident
Lors de son accident de voiture, Kiesza a subi une lésion cérébrale, mais elle ne le savait pas.
« Je ne connaissais rien à propos des lésions cérébrales. J’en savais un peu sur les commotions cérébrales, mais ce que je savais n’était pas exact », dit-elle. « Après l’accident, je ne comprenais pas ce qui se passait, et personne autour de moi ne savait quoi que ce soit. Je suis sortie de l’auto, j’étais stupéfaite. Il y avait un bourdonnement dans mes oreilles, et je manquais d’équilibre. Des gens m’ont demandé si je voulais aller à l’hôpital. J’ai dit que je ne le savais pas. »
« Je suis rentrée à pied chez moi ce soir-là, et je ne sais pas comment, mais j’ai pris mon vol pour New York le lendemain. C’est lorsque nous avons commencé à atterrir et que la pression a changé que j’ai commencé à soupçonner que quelque chose n’allait pas », dit Kiesza. « Après cinq jours où les symptômes se sont aggravés je me suis rendue à l’urgence, à New York. Ils m’ont dit que j’avais subi une commotion cérébrale et que je devais prendre une journée de congé. »
« C’est fou, on ressent des choses des jours et des mois après la blessure, elle s’aggrave et votre cerveau est en proie à des turbulences », explique Kiesza. « J’ai pris l’avion pour le Danemark et j’y ai donné un spectacle. J’avais presque annulé, mais c’était un spectacle important. Je me suis complètement effondrée par la suite. Je savais que quelque chose n’allait pas. »
« Après, j’ai tout annulé : c’était la fin de ma carrière à l’époque. »
Les premières étapes du rétablissement
Pendant les six mois suivants, Kiesza a passé la majeure partie de son temps seule, limitant ses activités en raison de nausées, de problèmes d’équilibre et de nombreux autres symptômes qui rendaient les activités de la vie quotidienne difficiles. Elle a fini par déménager à Los Angeles pour être proche de son cousin qui a des antécédents en neurologie et qui a pu offrir du soutien.
« Tous les jours, ma vie était une convalescence. J’expérimentais des thérapies. C’était douloureux; j’avais des nausées et des étourdissements tout le temps », dit Kiesza.
Kiesza n’avait pas seulement des symptômes physiques. « J’avais de la difficulté à contrôler mes émotions. J’ai dû surmonter beaucoup de craintes. J’avais peur de beaucoup de choses. J’avais peur de laver la vaisselle! » Aujourd’hui, Kiesza est encore aux prises avec la nausée, l’équilibre et même la lecture. « Je ne peux faire qu’un ou deux chapitres par jour, et je dois vraiment suivre la page. J’essaie toujours. Je suis fatiguée – mon cerveau lâche, et c’est terrible. On doit travailler fort pour réparer le cerveau. Mais je n’ai jamais perdu ma volonté. »
Elle avait toujours la volonté, mais parfois, il était difficile de trouver le chemin.
« Chaque lésion cérébrale est différente, et on ne sait pas comment les choses vont se passer. Personne ne le sait. Tout était un mystère pour l’avenir », explique Kiesza. Bon nombre de ses médecins et thérapeutes lui ont dit ouvertement qu’ils ne pouvaient pas prédire ce qui allait se passer après son rétablissement.
Kiesza a bénéficié de l’aide de sa famille et de ses amis, mais la plupart du temps, elle était seule. « C’était un voyage plus long par moi-même », dit-elle, ajoutant que cela fait une différence d’avoir des gens qui vous soutiennent. Mais il est également difficile d’expliquer aux gens ce qui vous arrive.
« Les gens me demandent pourquoi je n’ai pas fait quelque chose ou dit aux gens ce qui se passait [à l’époque]. C’est que mon cerveau était blessé. Je n’avais pas la capacité d’y penser, de me rendre compte de ce qui se passait, dit-elle. Je n’arrivais pas à y penser. »
« Ce qui a été vraiment utile, c’est qu’un neuroscientifique m’a expliqué ce qui arrivait à mon cerveau – l’explication au niveau scientifique m’a aidée à comprendre ce qui était réel et ce qui ne l’était pas », a dit Kiesza. Pour elle, comprendre qu’elle se sentait d’une certaine façon ou réagissait à une certaine chose à cause de sa lésion cérébrale l’a aidée à se concentrer sur son rétablissement.
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À quoi ressemble la vie après une lésion cérébrale
Au début, Kiesza savait que les choses ne seraient jamais les mêmes pour elle. « Il était impossible de revenir en arrière. J’avais beaucoup évolué », dit-elle. « Vous savez, quand vous repensez à des choses qui étaient terribles à l’époque, et que vous vous dites « Oh, ce n’était pas si mal? » En rétrospective, cela me fait peur. Je me demande comment j’y suis arrivée. »
Aujourd’hui, Kiesza suit encore diverses thérapies et utilise des outils et des activités pour avancer dans son rétablissement. « La cohérence est vraiment importante », explique Kiesza. Cela implique de faire une activité un peu tous les jours, en utilisant constamment votre cerveau. Un exemple est la lecture.
« J’essaie de lire tous les jours. J’ai l’impression de ne pas pouvoir rester connectée à la page, mais j’essaie d’en faire un peu plus. C’est comme la marche sur la corde raide neurologique », explique-t-elle, ajoutant qu’elle écoute son corps quand il est temps de s’arrêter.
« Je le fais aussi des exercices pour les bras parce que j’ai de la difficulté avec les bras et que je veux revenir au spectacle », ajoute-t-elle.
Kiesza a eu beaucoup de problèmes de sommeil après sa blessure, et bon nombre de ces problèmes persistent aujourd’hui. « Le réveil n’est pas plaisant. Je ne me réveille pas heureuse. Je me réveille et je me dis : « D’accord, je dois le faire », dit-elle. « J’avais beaucoup de difficulté à dormir. Je dormais pendant 18 heures et je me réveillais épuisée. J’ai passé des scintigraphies cérébrales et cette partie de mon cerveau ne se calmait pas. La rétroaction neurologique m’a aidée à cet égard. » La rétroaction neurologique consiste à surveiller les ondes cérébrales pour déterminer l’activité cérébrale, puis à utiliser ces renseignements pour éclairer les méthodes de traitement.
Bien qu’elle suive encore des thérapies et des traitements, Kiesza fait beaucoup de choses par elle-même qui l’ont aidée à composer avec les effets de sa lésion cérébrale.
« J’ai appris à dire non », dit-elle, ajoutant que le fait d’admettre ses limites l’a tenue à l’écart de situations dont elle savait qu’elles seraient excessives. « J’ai pris conscience des gens négatifs autour de moi. Cette négativité entraîne du stress, et j’en ai éliminé beaucoup ». Grâce à ce processus, elle a créé un réseau de personnes qui lui apportent beaucoup de soutien. « J’ai beaucoup appris sur la façon de me protéger tout en étant ouverte aux gens », dit-elle.
Kiesza passe maintenant beaucoup plus de temps à vérifier comment elle se sent. En tant que chanteuse et interprète avec des chansons et des chorégraphies très énergiques, Kiesza a souvent dû pousser son esprit et son corps pendant son emploi du temps épuisant. « Pendant les spectacles, avant la blessure, j’y donnais mon 100%. C’était dur, et je ne me suis jamais donnée le temps de penser », dit Kiesza.
Depuis sa blessure, Kiesza pratique une forme de méditation pour se centrer sur elle-même et ses émotions. « Je ne médite pas en restant assise dans une pièce. Ça se passe plutôt en moi », explique-t-elle. « Je trouve un endroit calme, parce que les sautes d’humeur et le stress m’épuisent. C’est difficile, et je travaille constamment là-dessus. »
En tant que personnalité publique, artiste et maintenant propriétaire d’entreprise, cette attention constante envers soi-même aide Kiesza à composer avec le stress quotidien, qui peut aggraver ses symptômes. « Le stress est comme un lion qui s’en prend à vous. Qu’il soit petit ou grand, c’est la même chose pour moi. Je dois me rappeler ce qui se passe réellement », explique-t-elle. « C’est une grande conversation avec moi-même. »
Kiesza a également adopté un nouveau régime* pour aider à gérer ses nausées et contribuer à sa santé globale. « Pas d’alcool, pas de caféine et pas de céréales », dit Kiesza. Elle admet que ces changements étaient difficiles. « Je pensais que j’allais devenir folle, mais cela a vraiment fait une grande différence. »
*Veuillez noter que les changements alimentaires ne doivent être apportés qu’en consultation avec votre fournisseur de soins de santé.
Lorsqu’on lui a demandé ce qui l’aidait le plus dans son rétablissement et ce qui pouvait aider les autres, Kiesza a eu trois réponses : la cohérence, l’aide des autres et la patience. « Il faut travailler sans relâche [pour aller mieux]. Ayez quelqu’un pour vous aider – quelqu’un qui sera honnête, qui n’essaiera pas d’édulcorer les choses. »
La compréhension de la patience a également aidé Kiesza à aller de l’avant. « Je voulais contrôler ma guérison. Lorsque j’ai cédé à la patience, le processus a changé. Je me suis rendue compte que je pouvais contribuer à ma guérison, mais que je ne pouvais pas la contrôler. »
Aujourd’hui, Kiesza reprend sa carrière musicale. Ce n’est pas la même chose qu’avant, mais elle en est reconnaissante.
« J’ai renoué avec la conteuse en moi. Mes paroles se sont ouvertes honnêtement », explique-t-elle. Écrire des chansons est toujours un défi. « Je n’ai pas été capable d’écrire pendant de très longues périodes, mais maintenant je suis capable d’écrire rapidement avant de me fatiguer. »
Kiesza a également lancé sa nouvelle maison de disques, Zebra Spirit Tribe. « J’étais inquiète », dit-elle à propos de la création de la marque. « C’est beaucoup plus de travail et une bataille difficile, mais d’une bonne façon. »
« Il faut du courage, et je m’en sers tout au long du processus. J’ai eu une deuxième chance dans la vie, et je ne vais pas emprunter la voie de la moindre résistance », dit-elle.
Le nom de sa maison de disques est venu d’une expérience qu’elle a vécue au début de son rétablissement. « Mon ami m’a recommandé une guérisseuse qui travaillait avec des animaux de pouvoir. J’étais ouverte d’esprit et j’essayais tout [pour aider à soigner la blessure]. La guérisseuse faisait beaucoup de travail corporel, donc tout au moins j’allais obtenir un bon massage. Elle travaillait dans mon dos et s’est arrêtée au bas du dos en disant que l’esprit zèbre lui parlait. Il y avait là un vide, quelque chose qui avait à voir avec ma lésion cérébrale. »
Pour Kiesza, le fait de s’attaquer au problème dans son dos l’a aidée à se sentir mieux et à se rétablir. Quand est venu le temps de nommer sa maison de disques, le choix semblait approprié.
Kiesza a l’intention de lancer un album hybride plus tard en 2020 et continuera de travailler sur son rétablissement, sa musique et son entreprise. « Je suis maintenant dans une position où je peux produire beaucoup plus, et je suis en train de disséquer mon voyage », dit Kiesza. « Ce n’est pas quelque chose à quoi j’aime toujours revenir, dit-elle, mais elle reconnaît que « mon histoire a beaucoup d’espoir ».
C’est cet espoir que Kiesza veut que les autres retiennent. « La blessure a changé ma façon de voir ma vie, dit-elle. C’est la chose la plus difficile à faire. C’est la chose la plus difficile que j’aie jamais faite », dit-elle à propos du rétablissement et de l’adoption de sa nouvelle vie. « Même si on a l’impression que ce que l’on vit est le pire, cela pourrait être une occasion de croissance », dit-elle. Pour Kiesza, cette perspective a fait toute la différence.