Carrick Wilken

Comment ma lésion cérébrale a changé ma vie pour toujours

Peu après mon 17e anniversaire, j’ai eu un accident qui m’a causé une lésion cérébrale catastrophique. Elle a eu et continuera d’avoir  des répercussions sur le restant de ma vie. Je me suis fait jeter ou suis tombé du lit d’un camion qui roulait sur l’autoroute à grande vitesse. Malheureusement, j’avais des habitudes qui étaient devenues trop courantes.

J’ai passé environ trois mois dans le coma. J’ai perdu la vue, j’ai été atteint de paralysie et j’ai eu de multiples accidents vasculaires cérébraux (9 en tout, l’un après l’autre). Mon histoire est une histoire de survie, mais surtout une histoire de sensibilisation. Je ne peux absolument pas expliquer le niveau de difficulté et de frustration que les handicaps peuvent causer au quotidien, mais j’espère que vous puissiez vous l’imaginer.

C’est mon frère aîné qui m’a trouvé, le soir fatidique de mon accident. Ensuite, ma sœur aînée est arrivée sur les lieux. Je ne peux que m’imaginer ce qu’ils ont dû vivre. Il y a beaucoup de coïncidences dans la vie, si on peut parler de coïncidence. Mon frère aîné revenait en ville avec des amis et ils m’ont trouvé sur le bord de la route, suivi d’autres véhicules, bien sûr. L’un d’eux était un autobus dans lequel se trouvait l’une de mes sœurs aînées et quelques-unes de ses amies. Je ne peux que spéculer sur comment je me suis retrouvé sur le bord de l’autoroute, mais j’y étais, et j’ai été sauvé par mon frère et ma soeur.

On m’a immédiatement emmené à l’hôpital et on m’a transporté par avion vers un endroit qui était prêt à faire face à une telle blessure. On m’a dit qu’au début, une partie de mon comportement a été attribué au fait qu’on soupçonnait que j’étais sous l’influence de l’alcool, mais en fait, c’était à cause d’une blessure à la tête et d’une hémorragie massive à l’intérieur de ma tête. Quand on se frappe la tête aussi fort, le cerveau peut enfler et créer beaucoup de pression.

J’ai dû subir une intervention chirurgicale afin de retirer un volet osseux et y installer un drain pour aider avec l’enflure. Il m’est difficile de me souvenir de tous les petits détails, évidemment, mais il m’est difficile d’en oublier les gros. Je ne souhaite à personne d’avoir à vivre cette expérience, la sensation de manquer de volet osseux et de devoir régulièrement se faire enlever du liquide. J’avais besoin d’anticoagulants pour réduire les caillots sanguins qui s’étaient formés. Pendant toute cette épreuve, mes parents ont pris soin de moi et m’ont administré la plupart des injections d’anticoagulants dont j’avais besoin. Il est difficile d’imaginer comment ils se sont sentis en le faisant, mais ils l’ont fait, et cela a certainement aidé. À bien des égards.

On a dit à ma famille que, si je survivais, j’aurais peu ou pas de qualité de vie et d’indépendance. J’étais en état de mort cérébrale et, en fait, j’ai fait du surplace à plus d’une occasion lorsque j’étais à l’hôpital, ce qui a dû être si difficile à voir. Je ne suis ni médecin ni professionnel du domaine médical, mais je sais qu’on dit que lorsqu’une personne se retrouve sans oxygène pendant une période prolongée, elle est incapable de se rétablir. J’ai été privé d’oxygène et c’est vrai que j’ai perdu beaucoup de choses, mais en faisant plein de tâches répétitives, j’ai pu récupérer beaucoup de choses, mais pas tout. Je dis « répétitif » parce qu’on m’a demandé souvent mon nom et mon âge, par exemple. J’ai passé de nombreuses heures à travailler sur différentes choses. Les cours d’élocution sont une autre chose dont il m’est difficile de me souvenir à 100 %, mais j’en garde de petits morceaux. Dieu merci, ma famille et les professionnels ont été patients avec moi et prêts à m’aider. J’attribue à ma famille, et plus particulièrement à mes parents, le mérite d’avoir été la principale raison pour laquelle j’ai pu me rétablir.

On avait dit à ma famille que je ne marcherais et ne parlerais plus jamais, que je dépendrais plus ou moins de la machine respiratoire et des soins auxiliaires pour toujours. C’est vrai que j’ai été dépendant d’eux pendant un certain temps, mais avec de l’aide, j’ai pu retrouver des capacités.

Avant ma blessure, j’étais très actif dans le domaine des sports et du travail, en général. C’étaient des choses que je prenais pour acquises. Je travaillais pour l’entreprise de construction de maisons en bois sur mesure de mon père, j’avais travaillé sur les fermes de certains amis lorsque possible, j’avais travaillé avec mon frère aîné sur certains de ses projets, et j’avais aidé mes grands-parents, pendant ma jeunesse. L’un d’eux avait une petite ferme d’élevage de bovins et l’autre une entreprise de construction. J’ai beaucoup aimé le temps que j’avais passé au travail et je ne l’oublierai jamais. J’étais au début d’un stage d’apprentissage et je travaillais fort pour faire ce que j’avais toujours voulu faire: travailler dans la construction et la menuiserie.

J’aimais aussi le sport. J’avais joué au hockey tout au long de mon enfance et de mon adolescence, avant ma blessure. J’avais aussi joué au baseball et au rugby à l’école secondaire. Maintenant que je suis incapable de faire ces choses, je suis tellement reconnaissant d’avoir pu en faire l’expérience. J’ai passé beaucoup de temps à pêcher, à faire du vélo et à bâtir des forts avec mes amis. L’air frais et la possibilité de passer du temps dehors et d’y apprendre sont des expériences inestimables dans la vie et le développement d’un enfant. À mon avis, il est aussi extrêmement important de passer du temps de qualité en famille et entre amis.

Je travaille fort chaque jour pour profiter pleinement de la vie. Être aveugle et vivre avec le risque de crises d’épilepsie n’est pas facile. Ma mission dans la vie est d’essayer de conscientiser les autres au sujet des blessures à la tête et des changements qu’apporte la perte de vue. Je suis aveugle et cela touche toutes les parties de ma vie. Je ne peux pas nier que c’est incroyablement frustrant; je n’ai pas l’air aveugle parce que c’est le résultat d’une blessure à la tête et d’accidents vasculaires cérébraux. Quand je dis que je n’ai pas l’air aveugle, je veux dire qu’il n’y a pas de différence dans mes yeux et je n’ai pas de chien-guide. J’ai ma canne blanche qui m’aide énormément. Beaucoup de gens ne savent pas que ces choses jouent un rôle crucial dans la vie de quelqu’un, car les apparences peuvent être très trompeuses et induire en erreur.

Si je disais que le fait de souffrir d’une lésion cérébrale ne me touche pas sur le plan cognitif, je mentirais. C’est certainement le cas. J’ai déjà été très bon en mathématiques et assez bon en résolution de problèmes. Je ne me suis certainement pas toujours appliqué de la façon ou dans les situations que j’aurais souhaitées. J’apprenais assez rapidement sur le chantier et j’avais de la facilité à écrire. Depuis ma lésion cérébrale, cependant, je trouve certaines choses difficiles, assez souvent, mais pas insurmontables! Comme tout autre obstacle, il faut trouver une autre façon de s’y prendre.

Je me fie aux signaux que j’établis moi-même, par exemple, mon réveil, ou le fait de m’endormir à la même heure pour pouvoir me réveiller à la même heure. Il faut vraiment faire des essais et des erreurs. Malheureusement, il s’agit surtout d’erreurs desquelles je dois apprendre. Je n’avais que 17 ans au moment de mon accident et je n’avais pas encore terminé mes études secondaires. Lorsque j’en ai été capable, j’ai préparé des choses par l’entremise de mon ergothérapeute et de l’école secondaire pour terminer mes études! L’ergothérapeute m’a beaucoup aidé, elle a été patiente et m’a expliqué tant de choses ! Elle m’a aidé avec le travail et m’a montré comment faire certaines choses. En fait, j’ai suivi deux cours en ligne avec son aide, en nutrition et en dressage de chiens! Cette ergothérapeute et ma famille m’ont aidé de bien des façons. Leur patience et leur compréhension ont été et sont inestimables! L’un de mes défis actuels est une mémoire défaillante. Il y a certainement des choses que je n’oublierai jamais, comme la sensation de perdre la capacité de bouger mes mains et de sentir le monde qui m’entoure, comme auparavant. Je ne me souviens pas de ce que c’est que d’être une personne « normale ». Je ne me souviens pas de beaucoup de choses que tant de gens prennent pour acquises chaque jour. Je peux apprécier ces choses, mais je ne m’en souviens pas.

Ce dont je me souviens, cependant, c’est de la tranquillité de l’amour d’un parent. Pas seulement l’amour que mes propres parents et ma famille m’ont donné, mais aussi l’amour et la tendresse dont j’ai été témoin de la part d’autres parents. Ma famille a tant fait pour moi au fil des ans et m’a aidé de bien des façons. Ils m’ont aidé à comprendre l’importance de lutter pour un avenir meilleur et pour une vision de la vie plus optimiste.

Je suis extrêmement fier d’être Canadien, je me sens honoré de venir d’un si beau pays qui a rendu mon rétablissement possible. Je m’entraîne aussi le plus fort possible chaque jour dans l’espoir de représenter notre pays et de donner de l’espoir aux autres. Si je peux sensibiliser les autres aux lésions cérébrales et à la perte de la vue, je voudrais leur montrer qu’il est possible de les surmonter en travaillant fort. Il fut un temps où je n’étais pas capable de marcher, ni de faire grand-chose, mais maintenant je peux pousser des centaines de livres sur une presse-jambe, faire du vélo (un kilomètre en une minute), et ramer aussi vite que certains rameurs professionnels. Quand j’étais enfant, j’aimais différents sports, j’adorais le hockey, j’aimais le baseball et le rugby et j’en profitais vraiment. Je regardais la boxe et la lutte chaque fois que je le pouvais; j’ai toujours voulu essayer ces sports parce qu’ils semblaient tellement amusants et que j’avais l’air d’y exceller. Il n’y a pas moyen de les pratiquer, mais il y a d’autres sports qui me passionnent. Je m’entraine avec des poids et haltères 4 à 6 jours par semaine. J’adore l’aviron et le cross-fit. Je suis devenu un fervent cycliste et je fais de la marche régulièrement. J’allais dans un gym polyvalent à Goderich, en Ontario, avant la pandémie, il y avait un entraîneur là-bas qui m’avait beaucoup aidé! Compréhensif, ouvert d’esprit, il m’a expliqué les choses et m’a beaucoup encouragé!

Maintenant que nous pouvons y retourner en toute sécurité, je m’entraine au YMCA. L’atmosphère y est excellente, c’est un gym propre, ouvert, bien géré, et l’entraîneur avec qui je travaille m’a beaucoup aidé! C’est un gars super et patient, qui prend le temps de m’expliquer et de me montrer des choses.

Je ne peux pas insister assez sur l’importance de faire de l’exercice et du conditionnement physique dans ma vie. Cela m’a aidé de bien des façons – non seulement à vivre en meilleure santé, mais aussi à garder mes forces, à atteindre mes objectifs et à gagner en confiance. Que vous cherchiez à atteindre un niveau de compétition ou que vous vouliez simplement essayer d’exercer davantage, je vous suggère une sorte de routine d’exercice. Après l’accident, j’ai fait de la réadaptation et j’ai travaillé avec des formateurs en réadaptation. Mon père m’a aussi beaucoup aidé à faire de l’exercice! Cela m’a rendu plus positif et confiant, ce qui est bon pour quiconque tente de se rétablir d’une blessure à la tête, ou de toute autre blessure.

Mon chien de compagnie est devenu une autre partie précieuse de ma vie. Il n’est absolument pas un chien d’assistance, mais plutôt un compagnon et un ami proche. Je crois que les chiens sont nos meilleurs amis pour une bonne raison!

Je ne pourrai jamais faire comprendre aux gens à quel point il est important d’être là les uns pour les autres. On ne peut pas le comprendre pleinement jusqu’à ce qu’on ait à vivre ces choses au quotidien, mais je vous demande simplement d’y réfléchir et d’apprécier combien notre vie est belle! Même si parfois c’est difficile, on peut tous  apprendre, parfois avec un peu plus d’aide, mais il n’y a rien de mal à cela! Il n’y a pas de quoi avoir honte. Les lésions cérébrales et la perte de la vue sont difficiles à bien des égards, mais si on n’essaie pas et on ne fait pas d’efforts, cela devient encore plus difficile!

Je fais ce que je fais pour la famille, les amis, mais je le fais aussi pour chaque personne qui a dû traverser des périodes difficiles, vaincre les obstacles, adossé au mur, et a pu triompher! Les lésions cérébrales et la perte de la vue sont difficiles à vivre, mais j’ai la chance d’être en vie et de voir, ne serait-ce qu’à 2.5-3%. J’ai eu la chance de retrouver la capacité de marcher, faire du vélo, de l’aviron. Par-dessus tout, j’ai eu la chance d’avoir eu une deuxième chance et l’environnement nécessaire pour me rétablir!

Voici donc mon histoire. Si elle peut contribuer à vous donner un peu d’espoir, j’espère qu’elle aura vous inspirer à ne jamais abandonner et à toujours lutter pour ce que vous aimez!

Evan Wall

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À 19 ans, Evan Wall était un jeune homme brillant, originaire de la petite ville de Shellbrook, en Saskatchewan, dont les seules préoccupations étaient le football, l’école d’ingénieurs et la fête. Il était un excellent étudiant qui avait toutes les raisons d’envisager un avenir très brillant jusqu’en 2016, lorsqu’un grave accident de voiture et la lésion cérébrale traumatique qui en a résulté ont stoppé net sa vie insouciante.

Evan ne se souvient pas de l’accident survenu tard dans la nuit, sur une route de campagne. Il était le passager d’un camion qui s’est retourné et l’a éjecté par le pare-brise dans un fossé. Les ambulanciers n’avaient pas beaucoup d’espoir quant à sa survie lorsqu’une ambulance aérienne du Shock Trauma Air Rescue Service (STARS) l’a transporté à l’hôpital Royal University de Saskatoon. Il y a passé deux semaines aux soins intensifs, inconscient. Outre des contusions aux poumons et d’autres blessures mineures, Evan avait aussi subi une lésion cérébrale axonale diffuse. Les neurologues ne pouvaient pas prédire s’il allait se réveiller ou passer le reste de sa vie dans un état végétatif.

Sa famille, inquiète, a été ravie lorsqu’Evan a ouvert les yeux, au bout de quelques semaines. Cependant, il a fallu beaucoup plus de temps avant qu’il ne devienne alerte. Evan a passé six semaines au service de neurologie à apprendre à communiquer par des secousses de la tête et des signes de la main. Pendant cette période, il a dû porter des couches, être nourri par une sonde gastrique et apprendre à s’asseoir dans un fauteuil roulant.

« Après six semaines, j’étais plus alerte, mais je ne parlais toujours pas et je ne réagissais qu’en répondant oui ou non à des questions, par des gestes de la main. Le degré d’éveil après une lésion cérébrale peut varier considérablement, et son diminution peut être l’un des effets permanents. La fatigue due à une activité non seulement physique mais aussi cognitive est très courante après une lésion cérébrale, un effet avec lequel je vis encore. »

La parole et la coordination motrice d’Evan avaient été gravement endommagées. Il a passé l’hiver suivant dans l’unité de réadaptation de l’hôpital de la ville de Saskatoon, où il a suivi un programme quotidien de thérapies de la parole, d’ergothérapie, de récréation et de physiothérapie dans l’espoir de retrouver ses capacités à marcher, à parler, à manger sans aide, ainsi que de nombreuses autres compétences de base.

« Tout ce que je faisais était incroyablement laborieux et lent. On pourrait penser que la frustration m’aurait fait perdre la tête, mais mon esprit était entièrement occupé par les tâches à accomplir. Dans ce nouvel état d’esprit, mon sens de l’autonomie était mis à l’épreuve à chaque instant et il n’y avait plus de place pour mon ancienne attitude blasée face à la réussite. Cette option avait disparu de ma vie. Le sens d’humilité était soudain et absolu. »

Lorsqu’il a reçu son congé de l’hôpital pour retourner chez ses parents à Shellbrook, en Saskatchewan, Evan avait passé six mois à l’hôpital. Il devait faire face à une vie changée à jamais. Les compétences sportives et les prouesses scolaires sur lesquelles il avait construit sa vie avaient disparu. Il allait devoir se rebâtir.

« Le travail était éreintant et très solitaire. Ce que je faisais et ce que je vivais était présent dans mon esprit, mais la réflexion de haut niveau prenait du temps. Quelques mois auparavant, j’étais un étudiant en ingénierie brillant, capable de résoudre des équations dans ma tête. Maintenant, ma conscience était entièrement occupée par des tâches et des mouvements apparemment banals. Ironiquement, l’apprentissage et l’adaptation qui se déroulaient à l’intérieur de mon cerveau étaient plus dynamiques et plus exigeants que ce qu’un adulte en bonne santé aurait à endurer. Je travaillais plus dur pour apprendre les compétences de base de la vie courante que je ne l’avais jamais fait auparavant, à l’université ou dans tout autre aspect de ma vie. »

« Je n’étais plus cet Evan Wall, et je ne savais vraiment pas encore ce que cela allait signifier. Tout était nouveau et effrayant sans le soutien hospitalier auquel j’étais habitué. Tout ce dont j’étais sûr, c’est que je voulais me mettre au travail et guérir le plus vite et le plus possible. »

L’entraînement musculaire quotidien dans sa salle de sport locale est vite devenu une planche de salut. Au fil du temps, le corps d’Evan s’est renforcé et sa coordination s’en est trouvée améliorée. Lorsqu’il a compris qu’une bonne santé l’aiderait à optimiser son rétablissement, Evan a également commencé à prendre davantage soin de lui, il a cessé de boire et de fumer pour de bon.

La famille d’Evan est entrée en contact avec la Saskatchewan Brain Injury Association et, par son intermédiaire, avec l’équipe de sensibilisation aux lésions cérébrales de Saskatchewan Health, qui gère le programme PARTY (Prevent Alcohol and Risk-related Trauma in Youth) destiné aux élèves du secondaire. Evan a été invité à faire équipe avec des ambulanciers, des pompiers et des policiers pour aider à sensibiliser les élèves du niveau secondaire aux résultats potentiels des comportements à risque. Depuis 2018, Evan a présenté des conférences dans des écoles secondaires de la Saskatchewan et est connu pour être un orateur très engageant auquel les élèves peuvent s’identifier.

« Entendre le témoignage d’un jeune proche de leur âge ayant subi une lésion cérébrale faisait passer le message. Il y avait peu de différence entre moi et ces élèves en ce qui concerne les intérêts et le mode de vie festif. Ils étaient très réceptifs lorsque j’ai parlé des détails de ma vie après une lésion cérébrale. Ils semblaient prendre le sujet de la sécurité au sérieux lorsqu’ils ont appris que j’avais dû porter des couches, que je ne travaillais plus, que je n’allais plus à l’école, et même que je ne pouvais plus parler aux filles comme auparavant. J’étais heureux de contribuer à l’éducation sur les lésions cérébrales et d’offrir mon temps pour aider à garder d’autres adolescents hors des hôpitaux. »

Cinq ans après son accident, Evan a retrouvé sa voix, mais sous une forme altérée, qui donne à certaines personnes l’impression erronée qu’il est handicapé mental. Il marche également sans aide, mais sa démarche est lente et difficile. Evan vit seul à Saskatoon, où il se rend encore quotidiennement au gymnase local. En fait, Evan est devenu un fervent culturiste et il a même participé à des compétitions de culturisme.

« Le culturisme est l’une des formes les plus pures d’autodiscipline, car on se bat contre soi-même en permanence. Même pendant l’effort, le corps crie haut et fort et constamment qu’il veut plus de glucides, mais il ne les obtient pas. Les résultats peuvent être spectaculaires, mais l’autodiscipline nécessaire pour y parvenir est énorme. Je ne pense pas que je serais là où je suis maintenant si je n’avais pas traversé les rigueurs physiques et émotionnelles d’avoir frôlé la mort. »

« Repousser mes limites a toujours fait partie de mon parcours. Je l’ai fait physiquement dans ma jeunesse. Depuis ma blessure, j’ai dû défier mes limites mentales et émotionnelles aussi. Et je le fais encore aujourd’hui. Je peux dire en toute sincérité qu’en vivant avec cette lésion cérébrale, je me suis bien familiarisé avec la faiblesse physique et, en y faisant face, je suis devenu plus fort que je ne l’aurais jamais imaginé. »

À son grand désarroi, Evan a constaté que le monde extérieur réagit différemment à son égard depuis son accident. Certaines connaissances ne lui parlent plus de la même façon qu’avant. Les étrangers détournent le regard ou, lorsqu’ils interagissent avec lui, lui parlent souvent comme à un petit enfant. Evan pense que la société a beaucoup à apprendre sur la façon d’interagir avec les personnes handicapées de manière plus respectueuse.

« S’il y a une chose que je sais de propre expérience, pour avoir été à la fois une personne handicapée et une personne non handicapée, c’est que le monde y réagit de manière très différente. Avant mon accident, je n’aurais jamais imaginé qu’un jour je parlerais de discrimination basée sur les handicaps, de la fragilité qui en découle et des microagressions. J’étais un adolescent fort, agile et capable qui, ayant grandi avec une sœur autiste et épileptique, a été élevé dans le respect des différences des autres. Les préjugés, sous quelque forme que ce soit, n’ont jamais traversé mon esprit ou mon chemin. Je n’avais même pas entendu parler de la discrimination basée sur les handicaps avant ma blessure. »

En 2020, Evan a entrepris un projet d’écriture collaborative sur son parcours, avec une amie écrivaine, Susanne Gauthier. Au fil de nombreux cafés et entretiens avec la famille, les amis et des membres de la communauté des lésions cérébrales, Susanne a rédigé l’histoire d’Evan dans tous ses détails – de son point de vue. Ce mémoire, rédigé en collaboration, intitulé Rebuilding a Brick Wall, publié par DriverWorks Ink, Regina SK 2021, est disponible dans les librairies canadiennes.

Que veut Evan que les gens retiennent de son histoire ?

« Pour ceux qui ont subi une blessure, j’aimerais qu’ils retiennent qu’ils vont toujours avancer, s’ils refusent d’abandonner. Même si la vie semble complètement différente de ce qu’elle était avant, il y a toujours des réussites et des moments de joie qui font que le voyage en vaut la peine, sans parler de la sagesse qu’on en gagne! »

« Pour les personnes valides, non-handicapées : vous ne pensez peut-être pas être mal à l’aise lorsque vous rencontrez une personne handicapée, vous ne croyez pas la traiter différemment, mais en êtes-vous sûr ? Les microagressions sont encore fortement ancrées dans notre culture. Nous commençons tout juste à reconnaître la variété des microagressions encore répandues envers les personnes ayant des différences de capacité. »

Vous trouverez de plus amples informations sur le site web d’Evan et Susan.

Julianne Heagy

julianne heagyC’était le mardi, 21 mai 2019. En me réveillant, je me rappelai que c’était le mardi d’après la longue fin de semaine et que j’avais plein de choses à rattraper au travail. Je me réveillai aussi en sachant que c’était notre 31e anniversaire de mariage et le jour où notre fille Justine allait passer la première partie d’un examen d’autorisation d’exercer la pharmacie en deux parties.

[Prière] « Seigneur, merci d’avoir mis Blair dans ma vie. Merci pour 31 ans de hauts et de bas et surtout d’avoir pu relever tous les défis et remporter toutes les victoires dans la prière. Je prie en particulier pour Justine ce matin et je vous demande de lui donner la paix, Seigneur. S’il vous plaît, aidez-la à trouver facilement les réponses aux questions de l’examen. Je vous demande également de garder Jared en sécurité au travail aujourd’hui. Je prie au nom de Jésus.” À la fin de ma prière, j’entendis le bruit de la voiture de notre fils Jared qui arrivait en ville et  partait travailler. Je lui dis silencieusement bonjour et je lui souhaitai une bonne journée.

Pendant que je m’habillais, je me déplaçais tranquillement dans le condo. Blair avait reçu un diagnostic de cancer du poumon six ans auparavant et il dormait jusqu’à 9h30, la plupart des matins. Il était au stade IV, mais il s’en tirait remarquablement bien. Il avait une attitude incroyablement positive.

En tant qu’agente des relations avec les membres au siège social de notre coopérative locale, c’était une période de l’année très chargée : nous mettions fin à deux grands événements, nous faisions des présentations de bourses d’études, nous faisions beaucoup de demandes de dons pour des événements d’été et nous négocions de la publicité avec notre nouvelle station de radio locale. Mon bureau était toujours rempli, mais j’aimais travailler sur plusieurs projets en même temps. Ce jour-là, j’avais tellement à faire que je décidai de manger mon déjeuner à mon bureau pour pouvoir partir à 17 heures pour notre souper d’anniversaire. La salade du resto au rez-de-chaussée convenait parfaitement.

À un moment donné au cours de la matinée, je me demandai comment l’examen de Justine était en train de se passer et je lui envoyai une autre petite prière.

13h39 Texto de Justine : « J’ai fini. C’est tout ce que je peux dire. Je vais faire la sieste. »

La journée était vraiment été longue. Mes yeux commençaient à me déranger. Il y avait des carrés de lumière dorée dans mon champ de vision.

17h19 Comme je ne me sentais pas bien, j’ai pensé envoyer un message texte à Justine pour amener son père à la coopérative afin qu’il puisse conduire ma voiture à la maison. J’écris à Justine : « Pouvez-vous venir me chercher avec papa à 17h30. J’ai du retard ».

Justine, « D’accord. Ça va? »

Moi, « Je ne sais pas »

Je savais que Blair et Justine allaient arriver sous peu, alors je décidai de communiquer avec les groupes pour leur faire part des demandes de dons que j’avais approuvées. Le premier était un don de cartes-cadeaux, mais je n’arrivais pas à trouver les mots « cartes-cadeaux » pour les écrire sur le formulaire de demande de don. Je me dis que la journée avait été longue et que j’allais y revenir. (J’ai examiné ce dossier après plusieurs mois et j’y avais écrit cinq lettres au hasard à l’endroit où je notais normalement ce que j’avais donné et la date). Le prochain don était un don de boeuf. Je décidai que c’était plus facile d’appeler le groupe, alors je composai le numéro. Quelqu’un répondit. Je dis « Bonjour, c’est … » mais je ne pus pas trouver le mot suivant. J’avais l’impression d’être dans une grande pièce sombre et vide, et je n’arrivais pas à trouver quoi que ce soit — pas un mot, pas une pensée, pas une idée, c’était le vide total. J’entendis la personne à l’autre bout du fil dire « Vous êtes de la coopérative? »

« Mhm » Je fus tellement gênée de ma réponse. Quelle terrible représentation de notre coopérative.

« Au sujet de notre demande de don? »

« Mhm »

« Allez-vous faire don du bœuf? »

« Mhm »

« Merci! »

Pendant tout ce temps, j’étais très gênée et voulais raccrocher, mais je me disais que ce serait encore plus impoli que de répondre avec une marmonne. Je voulais pleurer ! Je levai les yeux et vis Blair entrer dans le bureau administratif et se diriger vers mon bureau. Je me sentais très déséquilibrée et je me disais déjà qu’il me serait difficile de descendre les escaliers jusqu’au rez-de-chaussée et jusqu’au stationnement.

Les dames aux bureaux administratifs nous souhaitèrent un joyeux anniversaire et un bon souper. Je souris et hochai la tête, et je fis même un signe de la main au moment où nous partions. Je savais que j’avais besoin de l’appui de Blair pour descendre l’escalier. Justine attendait dehors dans la voiture et elle m’amena directement à l’hôpital. Si je pouvais parler, je leur aurais demandé de m’emmener à la maison pour dormir. Je croyais que je ne me sentais pas bien et j’étais fatiguée.

Je fus tellement heureuse de pouvoir m’allonger sur le lit de l’urgence de notre hôpital local. Il y avait beaucoup d’activité autour de moi et je reçus des perfusions dans les deux bras. Comme j’avais travaillé à l’hôpital local de façon intermittente pendant plus de 20 ans, je connais la plupart des membres du personnel infirmier, et je constatai qu’ils étaient inquiets. Lorsqu’on me demanda mon nom, je n’avais pas à trouver la réponse. Ensuite, lorsque je pus y penser, je n’arrivai pas à ouvrir ma bouche. Je ne pouvais pas prononcer mon propre nom. Je me concentrai avec toutes mes forces, puis dis : « Julianne ». C’était épuisant! Je voulais me reposer. Il n’y avait pas de pensée dans ma tête, pas de peur, pas de doute, seulement le désir de me reposer dans le calme vide.

Notre médecin de famille arriva et il y eut encore de l’agitation. On me demandait sans cesse mon nom. J’entendis quelqu’un dire que ma tension artérielle était de 215/90.

J’avais l’impression que l’ambulance était arrivée, mais aussi que je venais d’arriver.

Le trajet normal de 60 minutes jusqu’à Moose Jaw n’avait duré que 40 minutes.

Il y eut un autre tourbillon d’activité pendant que l’on préleva du sang et que je fus précipitée pour un tomodensitogramme.

Le scan indiqua qu’il ne s’agissait pas d’une hémorragie cérébrale, alors j’ai obtenu l’autorisation de recevoir le traitement ATP, de dissolvant de caillots.
J’ai dû m’être endormie de temps en temps parce que tout ce dont je me souviens, c’est que les infirmières avaient dit à Blair et à Justine que je devais rester au lit pendant 48 heures, car j’avais un risque élevé de saignement à la suite de l’ATP.

La tomodensitométrie a également montré que j’avais plus de 70 % d’occlusion de mon artère carotide gauche. Le médecin traitant nous a expliqué que j’avais été référée à un chirurgien à Regina pour une endarterectomie gauche :on allait m’ouvrir le cou et l’artère carotide gauche, on allait la nettoyer et ensuite mettre un patch sur la carotide avant de me refermer de nouveau.

J’ai subi la chirurgie et j’ai été renvoyée chez moi quelques jours plus tard.

Cela fait maintenant 19 mois que j’ai subi l’accident vasculaire cérébral. J’ai beaucoup appris depuis.

Quelques ressources que j’ai trouvées très utiles sont « Parlons d’AVC – Guide d’information pour les survivants et leur famille », publié par la Fondation des maladies du cœur et de l’AVC, et le guide « Retour au travail à la suite d’une lésion cérébrale acquise », que j’ai trouvé en ligne, sur le site web de Lésions cérébrales Canada.

En tant que massothérapeute agréée à la retraite, j’ai eu accès à de nombreux types de traitements. Je connaissais très bien certains d’entre eux alors que d’autres, nouveaux, m’ont été recommandés par d’autres thérapeutes. Parmi les thérapies que j’ai reçues, le reiki, la thérapie acoustique, le massage, le yoga, la réflexologie, etc., le traitement qui m’a le plus aidée à soulager mon anxiété a été la réflexologie émotionnelle offerte par un thérapeute de Regina. Je le recommande fortement.

Parlant d’anxiété, l’un des meilleurs conseils de mon ergothérapeute fut de trouver des activités comme des casse-têtes, le tricot ou d’autres travaux manuels que mes yeux me permettaient de faire. Cela permet de garder l’esprit dans le moment présent. En se concentrant sur le projet, on passe moins de temps à se préoccuper de l’avenir. Cela fonctionne!!

L’une de mes plus grandes frustrations est mon incapacité à lire pendant plus de 20 minutes. Je suis une lectrice passionnée et j’ai toujours adoré apprendre. Il m’a probablement fallu environ un an pour découvrir à quel point il était facile d’accéder à des livres audio. J’utilise l’application Libby. J’écoute aussi des balados qui m’inspirent et me motivent.

Le fait d’être dans de grands groupes ou dans des magasins me fait tourner la tête. Je m’y sens très déséquilibrée. Parfois, c’est si sérieux que j’ai l’impression de perdre le contrôle de ma vessie. S’il y a quelque chose de positif dans la pandémie COVID, pour moi, c’est que je peux commander mes produits d’épicerie en ligne, sans culpabilité, et les faire livrer chez moi. Un autre truc que j’ai appris, c’est que si je n’ai besoin que d’une seule chose dans un magasin, j’appelle à l’avance pour voir si le produit est disponible. S’il l’est, je demande s’ils peuvent le mettre de côté à la caisse et je leur donne l’heure d’arrivée prévue. S’ils n’en ont pas le temps, je demande le numéro de l’allée où se trouve l’article pour pouvoir entrer et sortir rapidement du magasin.

Même avant la COVID, rester à la maison et en sécurité était une réalité pour moi, surtout juste après mon accident vasculaire cérébral, lorsque mon équilibre était un problème. Avant, j’étais très indépendante et je voyageais beaucoup pour le plaisir et les affaires. Au cours des 19 derniers mois, je n’ai conduit que dans notre petite ville ou à quelques reprises chez notre fille, à 15 minutes de chez nous. Je trouve que les fossés roulent plus vite que la route et je ressens une fatigue extrême, même après un court trajet en voiture.

Sur le plan financier, nous avons dû faire des pieds et des mains pour obtenir de l’aide. J’ai une formation en assurance, alors cela aurait dû être  facile, mais le processus mental de demande était épuisant. Voici quelques conseils : si vous avez une police d’assurance vie, vérifiez si vous avez une clause d’exonération de prime; si vous avez une assurance contre les maladies graves, vous devrez peut-être prouver que les effets résiduels de déficience cognitive durent plus de 30 jours, alors parlez à votre ergothérapeute pour faire une évaluation cognitive; si vous présentez une demande de prestations d’invalidité du RPC, sachez que le traitement prend beaucoup de temps (pour moi, cela a pris sept mois avant l’approbation et huit mois avant le début des paiements).

Ne baissez pas les bras! C’est difficile et frustrant. Je sais qu’il y a des jours où l’on se sent un peu tiraillé, mais essayez de trouver des choses pour lesquelles vous pourriez être reconnaissant. Certains jours, on doit faire semblant jusqu’à ce que cela arrive, mais ça finit par arriver.

Acceptez de l’aide. C’est un point difficile pour la plupart d’entre nous, surtout si nous sommes habitués à profiter de notre indépendance. Sachez que votre ou vos soignants veulent ce qu’il y a de mieux pour vous. Pour ma part, je semble avoir perdu certains de mes filtres et je dis des choses que je n’aurais pas dites dans le passé. Parfois, cela me met dans l’embarras et d’autres fois cela me donne un sentiment d’autonomie. J’en suis venue à accepter que « c’est ce que c’est ». N’oubliez pas que votre soignant le plus proche reçoit probablement le gros de vos commentaires et de vos frustrations. Prenez le temps de vous en excuser et de lui dire à quel point vous l’appréciez.

Donnez-vous la permission d’évoluer vers un ‘nouveau vous’. Oh, comme je me suis poussée à essayer de retourner au travail, à ma vie d’avant. J’ai essayé de surmonter des maux de tête et des troubles visuels simplement pour pouvoir rester à l’ordinateur et éviter d’avoir le cerveau en compote. Environ cinq mois après mon accident vasculaire cérébral, j’ai dû prendre mon ordinateur et le mettre dans une boîte, pour ne plus l’utiliser. Mes thérapeutes et conseillers m’avaient tous dit de me reposer et de laisser mon cerveau guérir. En fait, j’avais l’impression de me reposer parce que je n’avais plus mon emploi, mon travail occasionnel à l’hôpital et mon entreprise à domicile. J’étais déterminée à lire parce que j’étais trop têtue pour croire que je pourrais être heureuse sans la lecture. Je vois maintenant à quel point je taxais mon cerveau car j’avais peur de le perdre si je ne le stimulais pas et ne le faisais pas travailler. Je peux vous dire une chose certaine : les choses vont changer, vous allez changer aussi et vous retrouverez la paix et la joie.

Je remercie Lésions cérébrales Canada de m’avoir donné l’occasion de vous faire part de certains aspects de mon parcours. J’espère sincèrement que cela sera utile aux autres.

Kiesza

KieszaEn 2017, la chanteuse canadienne Kiesza a été victime d’un accident de voiture à Toronto qui a causé une lésion cérébrale traumatique. Pendant deux ans, elle a travaillé à son rétablissement et elle publie maintenant de nouvelles chansons par l’entremise de sa propre maison de disques, Zebra Spirit Tribe. Mais le processus de rétablissement est loin d’être terminé. Kiesza a parlé avec Lésions cérébrales Canada à propos de sa blessure, de ses difficultés et de la façon dont elle progresse chaque jour.

Après l’accident

Lors de son accident de voiture, Kiesza a subi une lésion cérébrale, mais elle ne le savait pas.

« Je ne connaissais rien à propos des lésions cérébrales. J’en savais un peu sur les commotions cérébrales, mais ce que je savais n’était pas exact », dit-elle. « Après l’accident, je ne comprenais pas ce qui se passait, et personne autour de moi ne savait quoi que ce soit. Je suis sortie de l’auto, j’étais stupéfaite. Il y avait un bourdonnement dans mes oreilles, et je manquais d’équilibre. Des gens m’ont demandé si je voulais aller à l’hôpital. J’ai dit que je ne le savais pas. »

« Je suis rentrée à pied chez moi ce soir-là, et je ne sais pas comment, mais j’ai pris mon vol pour New York le lendemain. C’est lorsque nous avons commencé à atterrir et que la pression a changé que j’ai commencé à soupçonner que quelque chose n’allait pas », dit Kiesza. « Après cinq jours où les symptômes se sont aggravés je me suis rendue à l’urgence, à New York. Ils m’ont dit que j’avais subi une commotion cérébrale et que je devais prendre une journée de congé. »

« C’est fou, on ressent des choses des jours et des mois après la blessure, elle s’aggrave et votre cerveau est en proie à des turbulences », explique Kiesza. « J’ai pris l’avion pour le Danemark et j’y ai donné un spectacle. J’avais presque annulé, mais c’était un spectacle important. Je me suis complètement effondrée par la suite. Je savais que quelque chose n’allait pas. »

« Après, j’ai tout annulé : c’était la fin de ma carrière à l’époque. »

Les premières étapes du rétablissement

Pendant les six mois suivants, Kiesza a passé la majeure partie de son temps seule, limitant ses activités en raison de nausées, de problèmes d’équilibre et de nombreux autres symptômes qui rendaient les activités de la vie quotidienne difficiles. Elle a fini par déménager à Los Angeles pour être proche de son cousin qui a des antécédents en neurologie et qui a pu offrir du soutien.

« Tous les jours, ma vie était une convalescence. J’expérimentais des thérapies. C’était douloureux; j’avais des nausées et des étourdissements tout le temps », dit Kiesza.

Kiesza n’avait pas seulement des symptômes physiques. « J’avais de la difficulté à contrôler mes émotions. J’ai dû surmonter beaucoup de craintes. J’avais peur de beaucoup de choses. J’avais peur de laver la vaisselle! » Aujourd’hui, Kiesza est encore aux prises avec la nausée, l’équilibre et même la lecture. « Je ne peux faire qu’un ou deux chapitres par jour, et je dois vraiment suivre la page. J’essaie toujours. Je suis fatiguée – mon cerveau lâche, et c’est terrible. On doit travailler fort pour réparer le cerveau. Mais je n’ai jamais perdu ma volonté. »

Elle avait toujours la volonté, mais parfois, il était difficile de trouver le chemin.

« Chaque lésion cérébrale est différente, et on ne sait pas comment les choses vont se passer. Personne ne le sait. Tout était un mystère pour l’avenir », explique Kiesza. Bon nombre de ses médecins et thérapeutes lui ont dit ouvertement qu’ils ne pouvaient pas prédire ce qui allait se passer après son rétablissement.

Kiesza a bénéficié de l’aide de sa famille et de ses amis, mais la plupart du temps, elle était seule. « C’était un voyage plus long par moi-même », dit-elle, ajoutant que cela fait une différence d’avoir des gens qui vous soutiennent. Mais il est également difficile d’expliquer aux gens ce qui vous arrive.

« Les gens me demandent pourquoi je n’ai pas fait quelque chose ou dit aux gens ce qui se passait [à l’époque]. C’est que mon cerveau était blessé. Je n’avais pas la capacité d’y penser, de me rendre compte de ce qui se passait, dit-elle. Je n’arrivais pas à y penser. »

« Ce qui a été vraiment utile, c’est qu’un neuroscientifique m’a expliqué ce qui arrivait à mon cerveau – l’explication au niveau scientifique m’a aidée à comprendre ce qui était réel et ce qui ne l’était pas », a dit Kiesza. Pour elle, comprendre qu’elle se sentait d’une certaine façon ou réagissait à une certaine chose à cause de sa lésion cérébrale l’a aidée à se concentrer sur son rétablissement.
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À quoi ressemble la vie après une lésion cérébrale

Au début, Kiesza savait que les choses ne seraient jamais les mêmes pour elle. « Il était impossible de revenir en arrière. J’avais beaucoup évolué », dit-elle. « Vous savez, quand vous repensez à des choses qui étaient terribles à l’époque, et que vous vous dites « Oh, ce n’était pas si mal? » En rétrospective, cela me fait peur. Je me demande comment j’y suis arrivée. »

Aujourd’hui, Kiesza suit encore diverses thérapies et utilise des outils et des activités pour avancer dans son rétablissement. « La cohérence est vraiment importante », explique Kiesza. Cela implique de faire une activité un peu tous les jours, en utilisant constamment votre cerveau. Un exemple est la lecture.

« J’essaie de lire tous les jours. J’ai l’impression de ne pas pouvoir rester connectée à la page, mais j’essaie d’en faire un peu plus. C’est comme la marche sur la corde raide neurologique », explique-t-elle, ajoutant qu’elle écoute son corps quand il est temps de s’arrêter.

« Je le fais aussi des exercices pour les bras parce que j’ai de la difficulté avec les bras et que je veux revenir au spectacle », ajoute-t-elle.

Kiesza a eu beaucoup de problèmes de sommeil après sa blessure, et bon nombre de ces problèmes persistent aujourd’hui. « Le réveil n’est pas plaisant. Je ne me réveille pas heureuse. Je me réveille et je me dis : « D’accord, je dois le faire », dit-elle. « J’avais beaucoup de difficulté à dormir. Je dormais pendant 18 heures et je me réveillais épuisée. J’ai passé des scintigraphies cérébrales et cette partie de mon cerveau ne se calmait pas. La rétroaction neurologique m’a aidée à cet égard. » La rétroaction neurologique consiste à surveiller les ondes cérébrales pour déterminer l’activité cérébrale, puis à utiliser ces renseignements pour éclairer les méthodes de traitement.

Bien qu’elle suive encore des thérapies et des traitements, Kiesza fait beaucoup de choses par elle-même qui l’ont aidée à composer avec les effets de sa lésion cérébrale.

« J’ai appris à dire non », dit-elle, ajoutant que le fait d’admettre ses limites l’a tenue à l’écart de situations dont elle savait qu’elles seraient excessives. « J’ai pris conscience des gens négatifs autour de moi. Cette négativité entraîne du stress, et j’en ai éliminé beaucoup ». Grâce à ce processus, elle a créé un réseau de personnes qui lui apportent beaucoup de soutien. « J’ai beaucoup appris sur la façon de me protéger tout en étant ouverte aux gens », dit-elle.

Kiesza passe maintenant beaucoup plus de temps à vérifier comment elle se sent. En tant que chanteuse et interprète avec des chansons et des chorégraphies très énergiques, Kiesza a souvent dû pousser son esprit et son corps pendant son emploi du temps épuisant. « Pendant les spectacles, avant la blessure, j’y donnais mon 100%. C’était dur, et je ne me suis jamais donnée le temps de penser », dit Kiesza.

Depuis sa blessure, Kiesza pratique une forme de méditation pour se centrer sur elle-même et ses émotions. « Je ne médite pas en restant assise dans une pièce. Ça se passe plutôt en moi », explique-t-elle. « Je trouve un endroit calme, parce que les sautes d’humeur et le stress m’épuisent. C’est difficile, et je travaille constamment là-dessus. »

En tant que personnalité publique, artiste et maintenant propriétaire d’entreprise, cette attention constante envers soi-même aide Kiesza à composer avec le stress quotidien, qui peut aggraver ses symptômes. « Le stress est comme un lion qui s’en prend à vous. Qu’il soit petit ou grand, c’est la même chose pour moi. Je dois me rappeler ce qui se passe réellement », explique-t-elle. « C’est une grande conversation avec moi-même. »

Kiesza a également adopté un nouveau régime* pour aider à gérer ses nausées et contribuer à sa santé globale. « Pas d’alcool, pas de caféine et pas de céréales », dit Kiesza. Elle admet que ces changements étaient difficiles. « Je pensais que j’allais devenir folle, mais cela a vraiment fait une grande différence. »

*Veuillez noter que les changements alimentaires ne doivent être apportés qu’en consultation avec votre fournisseur de soins de santé.

Lorsqu’on lui a demandé ce qui l’aidait le plus dans son rétablissement et ce qui pouvait aider les autres, Kiesza a eu trois réponses : la cohérence, l’aide des autres et la patience. « Il faut travailler sans relâche [pour aller mieux]. Ayez quelqu’un pour vous aider – quelqu’un qui sera honnête, qui n’essaiera pas d’édulcorer les choses. »
La compréhension de la patience a également aidé Kiesza à aller de l’avant. « Je voulais contrôler ma guérison. Lorsque j’ai cédé à la patience, le processus a changé. Je me suis rendue compte que je pouvais contribuer à ma guérison, mais que je ne pouvais pas la contrôler. »

Aujourd’hui, Kiesza reprend sa carrière musicale. Ce n’est pas la même chose qu’avant, mais elle en est reconnaissante.

« J’ai renoué avec la conteuse en moi. Mes paroles se sont ouvertes honnêtement », explique-t-elle. Écrire des chansons est toujours un défi. « Je n’ai pas été capable d’écrire pendant de très longues périodes, mais maintenant je suis capable d’écrire rapidement avant de me fatiguer. »

Kiesza a également lancé sa nouvelle maison de disques, Zebra Spirit Tribe. « J’étais inquiète », dit-elle à propos de la création de la marque. « C’est beaucoup plus de travail et une bataille difficile, mais d’une bonne façon. »

« Il faut du courage, et je m’en sers tout au long du processus. J’ai eu une deuxième chance dans la vie, et je ne vais pas emprunter la voie de la moindre résistance », dit-elle.

Le nom de sa maison de disques est venu d’une expérience qu’elle a vécue au début de son rétablissement. « Mon ami m’a recommandé une guérisseuse qui travaillait avec des animaux de pouvoir. J’étais ouverte d’esprit et j’essayais tout [pour aider à soigner la blessure]. La guérisseuse faisait beaucoup de travail corporel, donc tout au moins j’allais obtenir un bon massage. Elle travaillait dans mon dos et s’est arrêtée au bas du dos en disant que l’esprit zèbre lui parlait. Il y avait là un vide, quelque chose qui avait à voir avec ma lésion cérébrale. »

Pour Kiesza, le fait de s’attaquer au problème dans son dos l’a aidée à se sentir mieux et à se rétablir. Quand est venu le temps de nommer sa maison de disques, le choix semblait approprié.

Kiesza a l’intention de lancer un album hybride plus tard en 2020 et continuera de travailler sur son rétablissement, sa musique et son entreprise. « Je suis maintenant dans une position où je peux produire beaucoup plus, et je suis en train de disséquer mon voyage », dit Kiesza. « Ce n’est pas quelque chose à quoi j’aime toujours revenir, dit-elle, mais elle reconnaît que « mon histoire a beaucoup d’espoir ».

C’est cet espoir que Kiesza veut que les autres retiennent. « La blessure a changé ma façon de voir ma vie, dit-elle. C’est la chose la plus difficile à faire. C’est la chose la plus difficile que j’aie jamais faite », dit-elle à propos du rétablissement et de l’adoption de sa nouvelle vie. « Même si on a l’impression que ce que l’on vit est le pire, cela pourrait être une occasion de croissance », dit-elle. Pour Kiesza, cette perspective a fait toute la différence.

Tim Kerr

Tim-KerrLe commandant Tim Kerr ne connaissait rien à propos des lésions cérébrales ni des accidents vasculaires cérébraux avant de subir le sien en 2012.

« C’est arrivé d’un coup, alors que j’étais en mer », explique Tim, qui était alors capitaine d’un destroyer au large de la côte ouest de l’Amérique. « Je faisais de l’exercice sur un exerciseur elliptique… et ensuite je me suis retrouvé à l’hôpital. »

Ce qui s’est passé entre l’appareil elliptique et le réveil à l’hôpital a été relaté à Tim par des membres d’équipage et des médecins. « L’équipe m’a trouvé en train de faire des convulsions; heureusement, nous avions à bord un professionnel de la santé qui a suivi le protocole d’AVC. On m’a évacué vers un autre navire à proximité avec un médecin à bord, qui a ensuite ordonné mon évacuation vers un hôpital à San Diego. »

Les premiers jours

« Je me suis réveillé et me suis senti surpris, effrayé et confus, se souvient Tim. J’avais beaucoup de questions. »

Il a fallu un certain temps aux médecins pour confirmer pourquoi Tim avait eu un accident vasculaire cérébral – il était un homme en bonne santé, dans la quarantaine, lorsque cela s’est produit. Mais après plusieurs tests, y compris des IRM, ils ont eu leur diagnostic. « J’ai eu un AVC hémorragique dans la partie droite du cerveau qui a affecté le côté gauche de mon corps », explique Tim. Il était paralysé du côté gauche du corps et avait de légers problèmes de mémoire.

« Je me disais « J’ai eu un accident vasculaire cérébral. Je suis handicapé. Est-ce que ça va être permanent? Est-ce que je vais me rétablir? » se souvient Tim. « Au début du rétablissement, j’étais extrêmement émotif – je ne pouvais pas  contrôler mes émotions. [Je ressentais] de la colère face à la situation, de l’incertitude, de la peur et de la tristesse. »

Une grande partie de cette incertitude s’est transformée en détermination. « La famille était une motivation : j’étais déterminé à me rétablir du mieux que je le pouvais », dit Tim. Il avait de jeunes enfants et il était déterminé à en faire le plus possible.

La réadaptation

La détermination de Tim a commencé à l’hôpital. Avant de commencer la réadaptation, il a essayé d’utiliser son côté droit pour gérer son déficit du côté gauche. « Par exemple, je me traînais jusqu’à la salle de bain avec l’aide de ma épouse ou j’utilisais d’autres soutiens dans la pièce avec mon côté droit pour essayer de compenser pour ma gauche. »

« Je n’avais pas réalisé, avant d’arriver au centre de réadaptation Élisabeth-Bruyère (à Ottawa), à quel point j’étais handicapée. J’étais en fauteuil roulant, on m’a montré ma chambre et ensuite la salle à manger, où se trouvaient les autres survivants d’accidents vasculaires cérébraux. Je me penchais en raison de mon déficit à gauche. L’un des bénévoles a essayé de commencer à me nourrir. »

Cette action fut un choc pour Tim. « Je me suis dit : ‘Est-ce ainsi que je serai ainsi pour le reste de ma vie?’ »

Cela a été difficile pour Tim de composer avec tous les changements auxquels il était confronté et aussi ceux qui l’attendaient pendant son rétablissement.

Après une semaine d’évaluation, le programme de réadaptation de Tim a démarré : un mélange de physiothérapie, d’ergothérapie et de thérapie cognitive. « Au cours de la première étape, j’ai travaillé sur mon tronc, j’ai fait des exercices pour mon cerveau afin de soutenir mon tronc et m’aider à m’asseoir droit. Nous avons passé un mois sur cette étape. »

« À la deuxième étape, j’ai fait des exercices pour les bras et les jambes. C’était un programme de physiothérapie très solide. Pendant la troisième étape, une fois que mon bras gauche a commencé à s’améliorer, je suis allé en ergothérapie pour travailler sur la motricité fine. »

Tim était motivé. « J’avais un objectif final en tête tout le temps : être assez mobile pour jouer avec mes enfants. » Mais au cours des six premières semaines, Tim n’avait pas vu beaucoup d’amélioration et il en était découragé. Bien qu’avoir un objectif ultime fut utile, Tim admet que le fait de mettre l’accent sur un objectif aussi important a rendu difficile l’obtention de résultats. « L’établissement d’objectifs quotidiens et hebdomadaires m’a aidé à voir des progrès, mais ce n’est que lorsque j’ai mis en œuvre ces petits objectifs que j’ai commencé à voir des résultats », dit-il.

Tim a passé trois mois et demi au centre Élisabeth Bruyère et a pu sortir avec une marchette. Il a poursuivi sa réadaptation en clinique externe et a commencé à utiliser une canne. Après plusieurs mois, il a pu marcher sans aide. Il attribue une partie de sa réussite en réadaptation à son âge, à ses antécédents militaires et à ses expériences passées.

« Ce n’était pas la première fois que j’étais en réadaptation, explique Tim. En 2009 (trois ans avant l’accident vasculaire cérébral), j’étais au Royaume-Uni pour suivre une formation. J’ai eu un accident de véhicule blindé et mon fémur droit est passé à travers ma hanche droite. J’ai passé une longue période de réadaptation au sein d’un groupe de traumatologie complexe au Royaume-Uni. J’y suis entré sur des béquilles. Tous les autres participants étaient des membres de la Royal Marine blessés au combat. Bon nombre d’entre eux avaient perdu des membres. J’ai fait de la réadaptation à leurs côtés, ils formaient un groupe incroyable de personnes. »

Cette expérience a montré à Tim l’importance d’être déterminé et d’avoir du soutien en réadaptation, ce qui l’a aidé après son accident vasculaire cérébral.

« J’ai eu tellement de soutien à Élisabeth Bruyère. J’adore le personnel. Je reconnais aussi que j’ai bénéficié d’un niveau de soutien rare de la part des militaires, de ma famille et de mes amis. »

À part son épouse et ses enfants, Tim a aussi reçu de fréquentes visites de ses parents. « Ils ont défendu mes droits, ils ont insisté pour moi », dit Tim. « Mon père m’a motivé, il m’a aidé. Il m’a même donné des bains – chose que je n’aurais jamais pensé qu’il doive refaire. »

Après avoir obtenu son congé du centre Élisabeth Bruyère, Tim a continué sa réadaptation en tant que patient externe. « Je suis très heureux de mon rétablissement. J’en suis un peu étonné, en rétrospective. J’ai récupéré environ 95 % de ma mobilité. J’utilise la prudence et des bâtons de marche pour faire de longues promenades, ainsi que des crampons en hiver. Je reste en santé en faisant de l’exercice en toute sécurité. Et maintenant, je fais du bénévolat pour le centre Élisabeth Bruyère. »

Même si Tim reconnaît que ce n’est pas tout le monde qui se rétablira autant que lui, il croit que le soutien et la motivation jouent un rôle important pour tout le monde. « Les gens perdent beaucoup de motivation et ratent des occasions d’amélioration parce qu’ils n’ont pas de soutien externe. Idéalement, tout le monde aurait quelqu’un – un défenseur de leurs droits ou un gestionnaire de cas qui fournirait cette aide externe pendant la réadaptation. » En tant que bénévole, Tim essaie de faire profiter les autres de son expérience personnelle et de sa détermination, en fournissant lui-même une partie de cette motivation.

Retour au travail

Au moment de son accident vasculaire cérébral, Tim était commandant de la Marine. Il terminait sa mission en mer et, au cours de son rétablissement initial, il prit un congé de maladie.

« Les militaires disposaient d’un mécanisme solide pour établir un plan de retour au travail. J’ai travaillé avec un gestionnaire de cas militaire», explique Tim. « J’ai recommencé le travail quelques demi-journées par semaine, environ neuf mois après l’accident vasculaire cérébral ; mes employeurs et moi avons lentement ajouté des demi-journées sur plusieurs mois. J’étais à temps plein quatorze mois après l’accident vasculaire cérébral. »

Tim ressent encore de la fatigue et prend des médicaments antiépileptiques. Après trois ans, il a reçu une libération pour raisons médicales des Forces armées canadiennes et travaille maintenant dans la fonction publique, au ministère des Anciens Combattants.

Chaque jour est un point de départ

Lorsqu’on lui a demandé ce qu’il voulait que les autres retiennent de son histoire, Tim eut une réponse simple à donner. « Peu importe ce qui vous arrive, vous pouvez toujours aller de l’avant. Ce qui est important, c’est de faire votre part du travail, d’établir des objectifs, d’essayer de trouver quelqu’un pour vous accompagner dans votre démarche et de toujours croire que vous pouvez vous rétablir, dans une certaine mesure. J’ai appris cette leçon lors de mon rétablissement. »

« Chaque jour est un point de départ. Vous vous devez de rendre votre vie aussi agréable que possible. »

Kinnie Starr

Kinnie-StarrLa chanteuse Kinnie Starr a subi une lésion cérébrale en 2015 après qu’un conducteur distrait roulant à 70 kilomètres à l’heure soit entré en collision avec son taxi, au centre-ville de Vancouver. Mais elle n’en a été informée que dix-huit mois plus tard.

« Je ne connaissais rien des lésions cérébrales [avant mon accident], explique Kinnie. J’ai été blessée à la colonne vertébrale et aux membres. »  Alors qu’elle travaillait à la réadaptation de ses blessures physiques, elle a commencé à se rendre compte qu’il y avait autre chose qui clochait.

« Quand je m’allongeais pour m’endormir, le lit tournait. Je ressentais des sensations comme le mouvement de la pièce, des problèmes de perception de la profondeur, et mes relations spatiales avaient changé », dit-elle. Kinnie savait que ces choses étaient réelles, mais puisque sa lésion cérébrale n’avait pas encore été découverte, elle avait de la difficulté à attirer l’attention sur ce qu’elle vivait – surtout que ses autres blessures étaient plus visibles et immédiates. « Il y avait beaucoup d’autres aspects à considérer : mes jambes, mon bassin, mes épaules et ma colonne vertébrale. Et je ne pouvais pas expliquer ce qui se passait à cause de la lésion cérébrale. »

« C’est mon mari qui a remarqué que quelque chose n’allait pas. Il m’a dit que j’inversais mes phrases, que j’avais des problèmes d’élocution et que ma façon de marcher avait changé. Il s’est écoulé environ un an, un an et demi avant que je ne reçoive [officiellement] un diagnostic. »

Trouver des réponses et le rétablissement adéquat

Le processus de recherche de réponses et de traitement a été long pour Kinnie et sa famille. Une fois qu’il était clair qu’il se passait quelque chose en plus que ses blessures physiques, il a fallu un certain temps pour trouver les bonnes solutions.

« J’ai été abasourdie par l’enquête médicale », dit Kinnie en essayant de décrire ce que c’était que de vivre avec une lésion cérébrale et de trouver un diagnostic. « C’est… ça vous accapare ». Lorsqu’elle a reçu son diagnostic, Kinnie a entrepris plusieurs types de réadaptation, dont bon nombre se poursuivent encore aujourd’hui. « Je suis toujours en réadaptation – par exemple, je poursuis la thérapie au laser froid, la privation sensorielle et les séances avec un chiropraticien. »

Bien que les thérapies soient d’une grande aide, Kinnie fait face à des défis tous les jours. « Je dois encore faire attention aux changements à la lumière », dit-elle. « J’essaie d’intégrer des moments où je me concentre sur mon bien-être, pendant mes journées, et de prévoir des moments où j’évite les stimuli. Par exemple, je porte un masque oculaire pour créer mon propre espace sombre. Même quelques minutes dans une salle de bain d’aéroport où je peux avoir un peu d’intimité, cela fait une grande différence pour moi. »

L’autre conseil de Kinnie est simple : « Éteignez votre téléphone ». Cela peut sembler petit comme geste, mais pour Kinnie, remplacer une partie de son temps de défilement par d’autres activités ou du repos a fait une grande différence.

L’impact sur sa musique

Les blessures de Kinnie ont eu un effet profond sur toute sa vie, y compris sur son gagne-pain en tant que musicienne. « Je suis passée de vivre ma vie à être incapable de faire mon travail. Je suis une artiste – c’est mon métier », dit-elle.

Il était difficile pour Kinnie de décrire son expérience lors des premières étapes de son rétablissement, surtout en ce qui a trait aux changements dans ses capacités. « Il n’y a aucun moyen d’expliquer ce manque lorsque vous n’êtes pas dans un environnement de travail standard », dit-elle. « Lorsque vous travaillez seul, vous n’avez pas de gens qui interagissent avec vous, qui remarquent des changements [en vous]. »

Il était même difficile pour Kinnie de s’asseoir et de prendre son instrument. « Je ne pouvais pas jouer la guitare : même en la regardant, je vomissais ou tombais de mon siège », dit-elle. Elle ressentait même occasionnellement les sensations qui accompagnent la miction.

À l’époque où Kinnie a eu son accident, elle s’était déjà engagée à créer un autre album intitulé ‘Feed the Fire’. « La maison de disques a embauché un producteur (Douglas Romanow) pour m’aider à respecter mon contrat, explique M. Kinnie. C’était la première fois que j’avais un co-auteur, c’était vraiment intéressant. » Kinnie avait l’habitude de travailler seule, et même lorsqu’elle travaillait avec Douglas, elle continuait d’écrire les paroles toute seule.

Le travail conjoint et sa lésion cérébrale ont créé un horaire inhabituel auquel ni l’un ni l’autre n’étaient habitués. « Quand nous avons commencé, je ne pouvais faire qu’environ 45 minutes à la fois, puis je devais faire une pause ou terminer la journée », dit M. Kinnie. C’était un changement par rapport aux journées complètes de travail qu’elle faisait dans le passé. « Douglas s’est avéré être un bon ami et il a été incroyablement patient », déclare M. Kinnie.

Grâce à sa patience et à son travail acharné, Kinnie a fait d’incroyables progrès dans son rétablissement et sa musique. « Maintenant, je peux faire huit heures par jour. » Et il y a six mois (2019), elle a pu recommencer à jouer de la guitare. C’était une étape importante, une étape qu’elle était heureuse de célébrer.

La façon dont les lésions cérébrales ont touché Kinnie a changé sa perspective de ce que c’est que d’être une artiste. « Je suis une nouvelle personne. Je ne prendrai plus jamais mes compétences musicales pour acquises », dit-elle.

Poursuivre la conversation

L’un des plus grands défis que Kinnie a dû relever est le manque de connaissances et de compréhension des lésions cérébrales. Bien que son mari, sa mère et d’autres membres de sa famille et amis lui aient offert un soutien incroyable, d’autres personnes ne comprenaient pas ce qui se passait.

« Les gens ne comprennent pas les lésions cérébrales. Certains pensaient que j’étais juste émotive », se souvient-elle. Maintenant, quelques années après l’accident, elle espère contribuer à changer cela.

« [Après l’accident] Je ne savais pas où aller pour obtenir de l’aide – même mon médecin ne savait pas que j’avais une lésion cérébrale », dit-elle. « Il y a beaucoup de désinformation sur la façon dont une lésion cérébrale se présente », ajoute-t-elle. Il ne s’agit pas d’un seul ensemble de symptômes – il y en a toute une gamme, et beaucoup en sont invisibles.

« Il n’y a pas assez d’information sur les émotions nuancées que l’on ressent et les lésions cérébrales », dit M. Kinnie. Elle explique qu’il y a beaucoup d’émotions liées à une lésion cérébrale, et pour elle, c’est facile de les voir quand on sait ce qu’on cherche. « Lorsque vous avez une lésion cérébrale, vous savez quand quelqu’un d’autre en a une. Ces personnes ont l’air perdues, confuses et effrayées », dit Kinnie, ajoutant qu’elle y était passée aussi.

Kinnie essaie également d’attirer l’attention sur les différences entre les sexes en ce qui concerne les blessures à la tête. Au cours de l’action en justice pour son accident, son avocat représentait trois autres femmes ayant subi des blessures à la tête, qui avaient toutes subi des changements radicaux dans leur santé génésique et leurs fonctions sexuelles. « Comme la santé sexuelle des femmes a toujours été liée exclusivement à la fonction reproductive, les femmes de plus de 30 ans qui souffrent de dysfonction sexuelle à la suite de lésions cérébrales sont facilement accusées d’exagérer… si ces questions sont portées devant les tribunaux. Les hommes, par contre, peuvent facilement démontrer une perte de fonction sexuelle parce que (pour eux) elle est visible », dit-elle. Ce fut une découverte révélatrice pour Kinnie. Elle a travaillé avec des chercheurs de l’Université de Calgary sur un article de revue médicale (qui sera bientôt publié) sur les femmes et les commotions cérébrales dans le but de faire avancer cette conversation particulière sur les lésions cérébrales et le genre.

Écoutez Kinnie Starr

Depuis sa blessure, Kinnie a participé activement à de nombreux projets, dont le documentaire Play Your Gender sur l’écart salarial entre les sexes dans l’industrie de la musique, et elle a été partenaire musicale du film en langue haïda ‘Edge of the Knife’. Elle a également composé de nouvelles pistes en 2020. On peut dire sans se tromper que les lésions cérébrales n’ont pas eu d’incidence sur la volonté de Kinnie de soutenir les causes auxquelles elle croit et de partager sa musique.

Pour en savoir plus sur sa musique et pour écouter ses chansons, visitez son site web ou consultez ses services de diffusion en continu.

Jonathan McMurray

Jonathan-McMurrayJe m’appelle Jonathan McMurray et je vis avec une lésion cérébrale depuis 1995. Tout a commencé en août 1995, à Rivière-du-Loup, au Québec. Nous étions trois étudiants de retour à l’Université Acadia, à Wolfville, en Nouvelle-Écosse. Nous étions en route de Georgetown, en Ontario, pour terminer notre dernière année à l’université. Ma vie a changé à jamais ce jour-là, tard le soir dans le noir, sur la route transcanadienne près de la frontière du Nouveau-Brunswick. Un pneu de voiture a éclaté et, lorsque la voiture a basculé, j’ai été éjecté de la fenêtre latérale. Ma ceinture de sécurité n’était pas bouclée parce que c’était mon tour de dormir et que j’étais allongé derrière.

L’aide est arrivée rapidement, car comme par hasard, il y avait un hôpital de traumatologie près du lieu de l’accident à Rivière-du-Loup. Vers minuit, l’hôpital a téléphoné à ma famille. On a demandé à ma famille de se rendre à la Rivière-du-Loup le plus rapidement possible alors que j’étais dans le coma (6/15 sur l’échelle de Glasgow). Ils sont venus de Georgetown, de Charlottetown, de l’Île-du-Prince-Édouard, et de Victoria, en Colombie-Britannique, sans savoir à quoi s’attendre ou ce qui les attendait. Personne ne savait que j’avais subi une lésion cérébrale, ils savaient seulement qu’ils devaient s’y rendre le plus rapidement possible.

Nous avions eu une vie sans souci jusqu’à ce moment-là. Mes parents, mes deux frères et moi habitions à Georgetown, une petite ville située à moins d’une heure à l’ouest de Toronto. J’avais eu des copines, j’avais joué au basketball et j’avais passé la majeure partie de mon temps libre sur ma planche à roulettes ou à écouter de la musique. Toute mon enfance et mes 22 années de vie ont été complètement effacées après ma lésion cérébrale. Ma vie n’avait donc pas seulement changé : elle avait pris fin. Tout m’avait été enlevé.

Je suis revenu sur terre en 1995, et j’y étais complètement étranger. Je ne connaissais aucune couleur, aucune forme ou quoi que ce soit d’autre. Heureusement, la musique était restée, ce qui a grandement contribué à ma réadaptation. Ma famille et mes amis, bien sûr, ont pu combler les innombrables lacunes de ma mémoire. Les médias sociaux m’ont aussi beaucoup aidé à reprendre ma vie en main. Pas complètement, parce qu’il y manquait 22 ans, mais le plus possible. Tout le monde partageait des histoires sur ma jeunesse, ce qui était pour moi un mystère total et ressemblait plus à une illusion ou à l’histoire de quelqu’un d’autre. Petit à petit, j’ai pu reconstituer assez d’histoires de mon passé pour me rendre compte que l’accident ne m’avait pas vraiment changé, qu’il avait simplement endommagé certaines parties.

Mes parents et mes frères ont toujours été là pour moi. J’ai dû les rencontrer comme si c’était la première fois et avoir la certitude absolue qu’ils savaient ce qui m’aiderait. Ils n’étaient pas trop présents, mais plutôt toujours là lorsque j’avais besoin d’aide. Ils me disaient que le raton laveur que j’avais presque laissé entrer chez nous n’était pas le chien du voisin, mais un animal un peu plus dangereux. Ou que cette crème à raser n’était pas de la crème fouettée et je ne devrais pas la mettre dans ma bouche. J’étais obligé de croire que ces personnes que je ne reconnaissais pas (mes parents) s’occuperaient de moi. Tout était entièrement étranger, alors j’ai dû espérer que cette « famille » savait ce dont j’avais besoin et la meilleure façon de l’obtenir.

Je me souviens d’une histoire qui remonte aux premiers jours de ma convalescence, lorsque j’ai été chargé de ramasser une cassette de musique pour le trajet jusqu’à Annapolis Royal. Mes parents et moi sommes entrés dans le magasin et ma mère m’a rappelé que j’avais le droit de choisir n’importe quel groupe. Une fois que nous nous sommes rendus à la section de cassettes du magasin, j’étais comme un poisson hors de l’eau. Il y avait beaucoup de groupes différents et je n’avais pas la moindre idée de quoi choisir. J’ai vu un membre du personnel (que j’ai reconnu en raison de l’uniforme) et je me suis dit qu’elle pouvait m’aider à choisir. « Excusez-moi, quelle cassette devrais-je acheter? » j’ai demandé.

Elle m’a regardé comme si j’étais un extraterrestre, et je suppose que j’étais très proche de l’être, à ce moment-là. « Je ne sais pas, qu’est-ce que vous aimez? »

« Je ne sais pas », lui ai-je dit, tout à fait honnête. Je ne savais pas ce que j’aimais ou ce que je voulais.

« Vous pourriez prendre la dernière cassette de Nirvana, ils ne feront plus de musique maintenant que Kurt Cobain est mort », m’a-t-elle dit.

« Kurt Cobain est mort? » Cela s’était produit il y a plus d’un an, mais je n’en avais aucune idée, et c’était un exemple de sentiment d’être « complètement perdu ». J’ai appris à accepter ce sentiment et à vivre avec, mais c’était l’une des dures réalités des lésions cérébrales. Quand nous sommes arrivés chez ma grand-mère et que j’ai dit à mon cousin Duncan que Kurt Cobain était mort, il a fait de son mieux pour ne pas me regarder comme si j’avais trois têtes.

Duncan et moi avons passé en revue mon énorme collection de musique par la suite, et quelque chose de choquant s’est produit. Pour une raison que je ne comprenais pas à l’époque, il y avait un tas de CD et d’enregistrements hip hop dans ma collection. Sans y penser à deux fois, j’ai pris chaque cassette ou CD qui ressemblait à un album de « rap » et je l’ai mis dans un sac pour le donner à mon cousin. Des centaines de dollars de musique ont été mis dans des sacs et donnés; j’étais certain que ce n’était pas ma musique. Environ un an plus tard, j’achetai de nouveau tous ces albums, mais à ce moment-là, j’étais absolument certain qu’ils ne m’appartenaient pas.
Ma lésion cérébrale s’est aussi accompagnée d’une agnosie visuelle, ce qui ajoute à la difficulté de ma vie déjà compliquée. L’agnosie visuelle, c’est quand on peut voir des choses, mais on ne peut pas nécessairement les comprendre en les regardant. Il y a quelques années, mon épouse est venue me rendre visite au travail, et je n’avais aucune idée qui elle était avant qu’elle ne parle. Elle s’était lissé les cheveux.

Ayant moi-même subi une lésion cérébrale traumatique, j’ai trois suggestions à vous faire au sujet de mon long parcours épuisant et frustrant – et de celui de ma famille.

1. Soyez patient – Le personnel médical comprendra ce point plus facilement que les patients, mais il est logique (faites-moi confiance). Faites de petits pas et célébrez vos réussites au fur et à mesure. Prenez note de ce que vous faites au fur et à mesure (vous pouvez ne pas penser que c’est une « grosse affaire » sur le coup, mais c’est une grosse affaire). Utilisez donc un carnet de route ou un horaire quotidien pour noter vos progrès. Cette observation de vos réalisations vous aidera à voir des progrès et à continuer d’être patient.

2. Prenez des pauses – Lorsque vous êtes fatigué ou épuisé, vous devez apprendre à vous accorder du temps. Évidemment, tout le monde veut améliorer sa situation, mais il faut être patient envers soi-même. Si vous pouviez écouter un disque, prendre une marche, ou jouer à un jeu, vous prendriez mieux soin de vous-même. Vous êtes beaucoup moins enclin à jeter la serviette et à vous reposer si vous prenez des pauses. Une fois que vous vous êtes éloignés de ce qui peut être une réalité intense, reprenez le travail sur votre projet d’auto-construction. Si vous persistez lorsque vous êtes fatigué, cela ne fonctionnera pas. Le projet ou la tâche ne sera pas fait aussi bien que possible, et si vous insistez trop, vous deviendrez soit encore plus frustré par votre situation et/ou commencerez à abandonner. Ne lâchez jamais. Ce n’est pas un test qui peut affecter vos notes : c’est votre nouvelle réalité. Aucun vaisseau spatial magique ne viendra du ciel pour tout ramener à la normale. En 1995, j’étais en si mauvais état que les médecins et les infirmières seraient étonnés de me voir aujourd’hui, mais j’ai pris des pauses et je n’ai jamais abandonné. Il n’y a pas de date d’échéance pour la réadaptation : c’est un processus comme un voyage.

3. Soyez heureux – Ce sera le conseil le plus difficile à comprendre et le plus susceptible de vous frustrer. Essayez toutefois de rechercher le positif dans la vie, appréciez la beauté qui nous entoure. Ce n’est pas à moi de deviner ou d’essayer de comprendre comment vous serez heureux. Vous savez comment être heureux. Ce pourrait être des casse-tête qui vous rendent heureux, de l’art, des livres d’images, observer les oiseaux, manger une orange, peu importe! Pour moi, ça a été la musique – elle avait la capacité de m’emmener dans un endroit beaucoup plus heureux. Donc, quand votre monde semble trop lourd ou trop intense, utilisez vos billets en première rangée pour un endroit plus heureux.

Il ne s’agit pas d’un conseil, mais d’un fait qui risque de se perdre dans le brouillard de la réadaptation. Plus tôt vous vous en rendrez compte, mieux vous serez préparé à ce qui pourrait vous attendre. Il y a 22 ans, ma famille et moi n’aurions jamais prédit jusqu’où j’irais. Nous n’aurions jamais deviné que j’allais  terminer mon baccalauréat ès arts à l’Université Acadia (avec des délais supplémentaires, bien-sûr), et que j’allais trouver un emploi. Ou que je rencontrerais une belle femme, que je me marierais et que j’aurais deux garçons. Que je fonctionnerais très bien comme un père au foyer. Ou qu’après une dizaine d’années de travail acharné, je deviendrai un auteur publié avec mon premier livre « Mind the Gap » qui décrit mon long voyage vers la santé.

Nous ne pouvions pas non plus prédire que, plus de 20 ans après ma lésion cérébrale, je recevrais un diagnostic de cancer dans trois parties différentes de mon corps. Heureusement, après une intervention chirurgicale et un traitement intense de chimiothérapie, j’ai appris récemment que je n’avais plus le cancer.

Grâce aux leçons que j’ai apprises au cours des deux dernières décennies et à un réseau de soutien composé de membres de ma famille et d’amis, je suis toujours ici. Je ne suis pas certain d’où je serais sans eux.

Je vous remercie d’avoir lu mon histoire et je vous souhaite bonne chance avec la vôtre.

Pour en savoir plus sur mon expérience, visitez mon site web : www.jonathanmcmurray.com

Cindy McNaughton

Cindy-survivorJe m’appelle Cindy McNaughton, et je vis avec les effets d’une commotion cérébrale depuis septembre 2015. Je vous présenterai mon expérience non pas pour vous faire peur, mais pour que vous sachiez que ce que vous vivez est normal, si vous êtes dans la même situation.

Je quittais le travail pour la journée. Je travaillais comme facteur à Postes Canada. La porte du quai de chargement était laissée ouverte aux trois quarts. Je cherchais mes clés dans mon sac et, lorsque je levai la tête, je cognai la barre d’acier au bas de la porte du quai.

Je me souviens d’une douleur atroce, d’une noirceur et de m’être pliée en position accroupie. Je me suis fendu le nez et le côté gauche de mon front était très enflé. J’ai aussi réussi à me coincer la mâchoire de telle façon que j’ai relâché mes deux dents avant.

J’ai eu la chance que l’un de mes superviseurs connaissait bien les commotions cérébrales. Un autre superviseur m’a accompagnée à l’hôpital, mais il a dû aller chercher son enfant avant qu’un médecin me voit. Je ne saurais trop insister sur l’importance d’avoir quelqu’un qui attende avec vous et qui s’assure que tout soit bien vérifié, et pose des questions sur ce à quoi s’attendre, quelles ressources peuvent aider et ce qu’il faut surveiller après que la personne ayant subi une commotion cérébrale ait quitté l’hôpital. Le médecin urgentiste soupçonnait que j’avais eu une commotion cérébrale. Je me souviens qu’il m’avait dit que je ne devais pas conduire, mais pendant combien de temps, je ne m’en souvenais plus.

Il est encore très émouvant pour moi de me penser à cette journée, car ma vie a beaucoup changé depuis. Honnêtement, je ne me souviens que du tout début de ma blessure. Les mois qui ont suivi semblent s’être évanouis.

J’avais beaucoup de mal à faire face aux bruits, aux lumières, aux foules et aux gens. J’étais fatiguée tout le temps et j’étais plus qu’irritable avec les plus petites choses. Ma mémoire à court terme était plutôt inexistante. Je détestais parler au téléphone et c’était tellement frustrant qu’on me demande constamment comment j’allais parce qu’il y avait tellement de choses qui m’arrivaient que je ne pouvais pas savoir exactement ce que je ressentais.

Ma cousine, à qui j’en suis si reconnaissante, est venue m’aider pendant une semaine et s’est occupée de ma fille. Je ne me souviens même pas de ce qu’elle a fait, à part me laisser dormir. Des mois plus tard, je me suis dit que tout irait bien rapidement. Mais ce n’était pas le cas et j’avais peur de penser que j’allais subir une commotion cérébrale pendant longtemps. J’ai commencé à faire des recherches sur Google sur les signes et les symptômes, et j’en avais tellement. J’ai senti un soulagement à l’idée que ce que je ressentais faisait partie intégrante d’une commotion cérébrale.

J’ai consulté un physiothérapeute qui m’a aidée à faire le suivi des choses, car mes yeux et mon cerveau ne s’alignaient tout simplement pas et ça me donnait des nausées. Les exercices pour le cerveau qu’on m’a donnés me fatiguaient tellement que je faisais des siestes pendant des heures après. L’un des symptômes les plus difficiles pour moi a été ma perte de mémoire. Tout le monde remarquait que lorsque je disais  quelque chose, deux minutes plus tard, j’oubliais. Utiliser des feuillets autoadhésifs m’a beaucoup aidée à me souvenir des choses. Un autre symptôme très frustrant – qui persiste encore, quatre ans plus tard – est d’avoir un mot sur le bout de ma langue et ne pas être capable de le trouver. Je me souviens de la version longue ou différente du mot et j’utilise un dictionnaire de synonymes pour trouver le bon mot. J’espère que cela s’améliore avec le temps.

J’ai fini par retourner au travail. Je suis massothérapeute agréée depuis 2002 et je travaillais à temps partiel lorsque je travaillais pour Postes Canada. J’y ai été employée temporaire pendant sept ans, et j’ai pris un congé de trois mois après ma commotion cérébrale, car si je prenais plus de temps, j’aurais perdu mon ancienneté. Je ne fonctionnais pas à 100 % de façon optimale mais je n’étais pas capable de négocier un congé plus long, alors je suis retournée au travail et j’ai fini par me faire une grave entorse à la cheville. Je savais que j’avais besoin de plus de temps pour guérir et que le fait de travailler à Postes Canada n’allait pas le faciliter, alors j’ai décidé d’ouvrir une clinique de massage et j’ai remis ma démission en octobre 2016. J’aurais dû me battre plus fort, mais je n’avais personne pour m’aider. J’avais repris le travail, mais cette période de moins d’un an est un énorme vide et je ne me souviens pas des petits détails.

J’utilise beaucoup de stratégies d’adaptation, comme les feuillets autoadhésifs et le dictionnaire de synonymes. Une autre stratégie d’adaptation consiste à faire savoir à tous ceux que je connais bien que j’ai subi une commotion cérébrale, ce qui fait que les choses ne fonctionnent pas aussi bien dans mon cerveau qu’auparavant. J’ai aussi vu un physiothérapeute axé sur les commotions cérébrales qui a travaillé sur le suivi de mon cerveau, mes yeux, mon équilibre et ma coordination oculo-manuelle.

Cela m’a fait comprendre que j’étais « normale » à avoir les symptômes que je subissais. La stratégie la plus utile, c’est d’être patiente avec moi-même, ce qui n’a pas toujours été le cas. Je ne suis plus qui j’étais. Mon cerveau ne fonctionne pas de la même façon, même s’il s’améliore, mais si j’oublie quelque chose ou si je ne peux plus faire de montagnes russes avec ma fille, c’est mon mode de vie et je l’accepte.

Le temps aide à guérir. Soyez patient avec vous-même et soyez ouvert avec les autres à propos de vos défis, pour qu’ils puissent vous aider. Prenez toujours soin de vous.

Michael McNally

Mike McNallyJe m’appelle Michael McNally et je souffre d’une lésion cérébrale depuis l’automne 2009.

J’étais en route vers la maison après le travail, lorsque j’ai eu un ‘blackout’ et j’ai eu un accident de voiture. Les médecins ont compris que j’avais eu un anévrisme cérébral qui a causé mon accident.

J’ai passé de 6 à 9 mois dans le coma à l’hôpital de Hamilton. J’avais beaucoup de sang dans le cerveau, et j’ai reçu de 4 à 5 transfusions sanguines. Les dommages étaient surtout du côté droit de mon cerveau, et j’ai subi une intervention chirurgicale.

J’ai passé deux ans et demi à l’hôpital. J’habite maintenant à la résidence de soins à long terme Thornton View, à Oshawa.

Lorsque j’ai subi la lésion cérébrale, je ne pouvais pas bouger le côté gauche de mon corps ; j’ai aussi perdu la capacité d’avaler des aliments entiers et une partie de ma capacité de parler. Les médecins m’ont dit que je ne marcherais probablement plus jamais.

Après qu’on m’ait dit que je ne marcherais plus, j’ai fait beaucoup de physiothérapie. Un exercice qui m’a vraiment aidé à améliorer ma mobilité a été de lancer un ballon de part et d’autre avec mon thérapeute.

Aujourd’hui, j’ai un compteur de pas et j’utilise une marchette. Je peux même marcher un peu sans marchette. Je participe aux marches de financement de la Brain Injury Society of Toronto, et la dernière fois, nous avons recueilli 18 000 $.

Je conseille aux autres personnes qui ont subi des lésions cérébrales de ne jamais abandonner. Pas même une seule fois. C’est difficile : j’ai encore des migraines et un trouble de la parole. Mais je continue de faire de la physiothérapie et mes efforts portent leurs fruits. Mon objectif est de continuer à aller mieux pour que je puisse sortir d’ici et rentrer chez moi, vivre avec mon épouse et mes enfants.

Je tiens à remercier mon épouse, Dawn, et mes enfants, Taylor et Ryan, ma mère et mon père, mes frères, Mark et Matthew, ainsi que tous mes amis à l’étranger et ici, à Thornton View, pour leur amour et leur soutien constants.